Se reconstruire, après un viol

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Séverine MAYER

Se reconstruire, après un viol

Le viol est un fléau, un tabou, un meurtre [1]. Et il tue deux fois lorsque la victime n’est pas entendue, comprise, crue. Lorsque sa parole est traînée dans la boue, qu’elle doit prouver son innocence, qu’elle est présumée coupable. Coupable de séduction, de porter une jupe, d’être une femme ou un enfant affabulateur. Viol comme arme de guerre, viol en bande, viol par un religieux, viol incestueux,… Comment vivre avec l’indicible mal à l’intime de sa chair ? Qui dira l’effroyable blessure ? Il est des souffrances qui ne s’inventent pas. Il est des souffrances qui demandent un temps fou pour se dire. Il est des souffrances refoulées au plus profond de soi. L’être disjoncte, se coupe en deux. Pour s’extraire de l’horreur, pour anesthésier l’effraction. Se relève-t-on jamais d’un viol, d’une vie saccagée ? À voir leur mine meurtrie, à voir leur effondrement une vie durant, je devine la force surhumaine pour ne pas baisser les bras, pour ne pas tomber dans la folie, pour ne pas se tuer pour de bon. Tant de ces femmes et de ces hommes continuent à vivre avec la honte, la culpabilité et le mensonge. Pour seule compagnie, nuit et jour. Infini courage pour celles et ceux qui retrouvent la parole, osent enfin briser les chaînes de leur silence et le déni de celles et ceux qui savaient.

La victime n’est jamais coupable

Parmi tant d’autres, je voudrais évoquer le témoignage « hors norme » de Séverine Mayer [2]. Son livre, justement intitulé « La parole » [3],  débute par ces mots de Boris Cyrulnik : « Dans la plupart des cultures, on est coupable d’être une victime. » Comment ne pas être touché par son histoire d’enfance ? Cet enfant innocent qui tombe sous les sévices continus de son beau-père qu’il doit appeler « papa ». De l’âge de quatre à dix-huit ans. L’histoire d’un viol, avec un scénario désormais bien connu : « Ma famille n’a jamais cherché à comprendre. Ma mère, mes frères, ils savent, mais refusent de voir la réalité, ils se la cachent pour sauvegarder les apparences. Et ils m’ont confiné à un rôle, celui de la fille qui ne va pas très bien, qui a des problèmes, toujours un peu ‘borderline’. J’ai toujours souffert et je souffre encore de ce déni » [4]. Séverine Mayer entend dénoncer cette réalité, pour que d’autres, à leur tour, osent une parole libératrice et sortent enfin de leur prison. Parce que, résolument, la honte doit changer de camp. Parce que le mal subi ne s’oublie pas et qu’il est indispensable que justice soit rendue. Depuis, elle a lancé une pétition en ligne contre l’imprescriptibilité, sur change.org [5]. Elle y témoigne de son vécu et de son combat pour les autres. Les bourreaux doivent savoir que, tôt ou tard, ils devront répondre de leurs actes. La souffrance est imprescriptible, les actes commis aussi.

Oser parler, pour se reconstruire

Séverine Mayer est aujourd’hui mariée, mère de trois enfants. « J’avais 35 ans lorsque j’ai rencontré celui qui est mon mari aujourd’hui. Je lui ai tout dit. Tout de ce que j’avais vécu enfant, mais aussi toutes les conséquences que ça avait eu sur ma vie : addictions, prises de risques, tentatives de suicide, crise de nerfs, actes manqués… Le pire de moi, il le savait. Il ne m’a pas jugée, n’a pas eu pitié. Il s’est contenté de recueillir ma parole, de me croire et de m’offrir un soutien, un refuge entre ses bras. J’ai enfin pu redevenir vivante, recoller les morceaux de moi qui étaient éparpillés » [6].

Se reconstruire passe toujours par la parole. Puisse son témoignage en inspirer beaucoup d’autres !

Pascal HUBERT, Golias Hebdo, n° 516

http://www.golias-editions.fr/article5507.html

[1] Dre Muriel Salmona, « Le viol, crime absolu », https://lc.cx/mN4D

[2]  https://www.severinemayer.com/

[3] Séverine Mayer, La parole, Edilivre, 2013.

[4]  https://lc.cx/mN4e

[5] https://lc.cx/mN4w

[6] https://lc.cx/mN4G

 

 

sever

https://www.severinemayer.com/

 

N’hésitez pas à m’écrire, me donner votre avis, m’adresser une suggestion : deviens.ce.que.tu.es333@gmail.com

9 réponses sur « Se reconstruire, après un viol »

  1. Coucou Pascal

    Ca fait plus d’un an que je soutiens différentes pétitions de Séverine et d’autant plus que j’ai le même parcours d’enfant incestée.
    Son combat et ce qu’elle décrit sont proches de mon vécu.
    La seule différence est que j’ai eu deux agresseurs: mon père et sa tante côté maternel.
    Et l’inceste a démarré j’avais 5 ans et s’est terminé j’en avais 17.
    Si je n’ai pas acheté les livres de Séverine, je sais parfaitement et dans ma chair aussi ce qu’elle a enduré.
    Et je comprends tout à fait son positionnement, ses ressentis, ses difficultés.
    Mais tu vois, moi je ne pourrais pas écrire un livre témoignage sur le sujet comme Séverine Mayer ou Christine Angot l’ont fait. Je pourrais en parler mais plutôt comme ça sur des messages ou par le truchement de personnages dans un roman, une fiction (je l’ai fait en partie dans un roman de terroir façon thriller que j’ai écrit sans qu’il s’agisse du tout du même contexte ni de la même époque ni des mêmes situations). Mais tu vois, je ne pourrais pas évoquer directement mes agresseurs dans un livre. Ce serait trop douloureux pour moi.
    Ce qu’ils m’ont fait reste une plaie à vif alors que je me rapproche de la cinquantaine…même si je me considère comme ancienne victime, donc ayant déjà fait un bon bout de chemin et me considérant sortie d’affaire par rapport à ces crimes. C’est te dire la durabilité et la violence traumatique du crime d’inceste.Et puis s’est rajouté en plus le meurtre paternel. Ce qui m’a contrainte à plaindre un de mes agresseurs et à prendre en quelque sorte sa défense en enquêtant sur ceux qui l’ont tué. Ce qui est peut-être la pire chose que j’ai eu à vivre et que j’ai toujours à vivre (puisque je n’ai toujours pas découvert qui exactement l’a tué même si je sais que sa mort a été décidée et orchestrée par l’Opus Dei), bien qu’il soit mort depuis près de 15 ans. Et ça, je crois, pèse autant que le crime d’inceste et fait qu’il est encore plus impardonnable.

    Chaque victime après autant de temps d’inceste subi, tente de se reconstruire avec ses propres moyens et limites aussi. C’est très long, on a l’impression souvent qu’on est définitivement morte, parce qu’à chaque étape de vie, s’opère une sorte de rappel de l’inceste, même quand les agresseurs sont depuis longtemps décédés. Et en plus on y pense tous les jours.
    On doit vivre avec, gérer le quotidien quand même, souvent jouer la comédie du « tout va bien! » quand en réalité tout va mal. Et ce n’est pas simple.
    Il y a tout un parcours à faire, des étapes dont on se dit que c’est une injustice de plus à subir.
    Et puis il y a ce marquage au fer rouge tant vis à vis des agresseurs que de notre famille que de la société toute entière.
    L’inceste est une marque d’infamie et nous serons toujours désignés coupables, affabulateurs par la société alors que les agresseurs seront protégés ou disculpés.
    Et ce qui est encore plus horrible, je trouve, c’est qu’il nous sera difficile d’exister hors de ce stigmate. Que ce soit socialement, professionnellement, artistiquement, etc, etc. C’est comme si nous étions atteints de la peste ou de monstruosité. Il n’y a que cela que les gens retiennent de nous.
    Même si nous sommes différents de ce crime monstrueux que nous avons subi.

    La société ne veut pas affronter ce crime je crois, de peur d’y perdre sa cohésion ou sa raison d’être au plan patriarcal.
    Et je crois que c’est le même problème concernant le catholicisme institutionnel lié pour partie à la pédocriminalité.

    Séverine comme moi est passée par plein d’interrogations sur comment vivre en couple quand on a subi autant d’horreurs, comment pouvoir gérer une grossesse, un accouchement sans être hantée par le traumatisme, comment surmonter la peur que nos enfants subissent aussi ça, comment parvenir à déjà se pardonner de n’avoir pas dénoncé les agresseurs immédiatement, de se déculpabiliser, d’accepter la réalité du déni familial et tracer la route, faire suffisamment confiance en la vie, en soi et dans les autres (dans la mesure où ils sont extérieurs à ces comportements criminels familiaux) pour se relever et avancer. Comment gérer les changements corporels et hormonaux qui peuvent poser plus de problèmes parce qu’il y a eu l’inceste avant, comment traiter les pathologies liées à l’inceste, comment travailler sur l’emprise, les fidélités familiales, retrouver l’enfant intérieur et le décharger du poids de l’inceste pour lui rendre ce qui lui a été volé…

    Les thérapies d’aujourd’hui aident énormément mais encore faut-il pouvoir et vouloir les suivre.
    Ce dont ne sont pas capables toutes les victimes malheureusement. Chacune fait comme elle peut.
    Chacune est particulière parce que l’inceste n’est jamais le même d’une personne à l’autre et n’atteint pas dans les mêmes proportions ni sur les mêmes plans les unes ou les autres.

    J’ai suivi ces thérapies (l’EMDR notamment et différentes psy jungiennes) qui m’ont énormément apporté. Mais ça n’éliminera jamais l’horreur criminelle subie. Quelque chose est définitivement brisé.Je le sais et chaque victime d’inceste le sait. Nous prenons perpète, de façon automatique, alors que la plupart de nos agresseurs ne seront jamais inquiétés au pénal et mourront de leur belle mort comme on dit. Et nous ne devons compter que sur nous-mêmes pour avancer. Personne ne pourra le faire à notre place. C’est au degré d’autorisation que nous nous donnerons de vivre et de nous réaliser que nous pourrons nous extraire petit à petit de cet inceste et enfin sortir de l’emprise et de la négation, de la destruction qu’ont plaqué sur nous nos agresseurs.

    Ca c’est notre réalité. Et tu vois, au coeur de ce marasme, de ce puits sans fond, en ce qui me concerne, deux chansons m’ont énormément aidée au moment où j’en avais le plus besoin, c’est à dire au moment où j’ai rompu les liens familiaux, pris mon autonomie après avoir dénoncé les crimes subis. La première était une chanson de Michel Berger: Si tu plonges.

    L’autre chanson était de Goldman:

    Cycliquement, quand le découragement ou des réminiscences un peu glauques du passé traumatique me reviennent, me parasitent, je les réécoute. Et ça me redynamise. Des chansons à vivre, comme on dit. Une façon de se trouver des phares dans la nuit pour surmonter les violences.

    Je continue à suivre, comme toi, sans doute, Séverine et son combat, de la soutenir. Je suis aussi différents blogs de victimes d’inceste, ce qui s’y dit, ce qui évolue, dont notamment les actions de l’AIVI. Et je milite pour faire cesser la correctionnalisation des crimes sexuels dont l’inceste en délit. Et qu’ils soient reconnus comme crimes contre l’humanité.
    Sans doute que je ne verrai pas d’ici ma mort ce changement, mais j’y travaille comme pas mal d’autres anciennes victimes.

    Bises, Pascal!

    Amitiés
    Françoise

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    1. Tu es bien courageuse Françoise et tu décris très bien l’expérience de l’inceste. Je comprends aussi qu’il soit plus aisé d’écrire un post de manière informelle, en réponse à un billet, plutôt que de devoir « construire » tout un livre autour du sujet. Mais tu pourrais déjà reprendre ce post en guise « d’introduction »…. Tu as un talent indéniable pour écrire les choses de la vie… Bises et bonne continuation à toi. De toute façon, on se suit 🙂 Amitiés. Pascal

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  2. Merci mais je ne pense pas être courageuse, Pascal.
    Et tu vois, ça ne me dit pas du tout d’écrire un truc aussi personnel et glauque de façon directe. Ca me dérange pas dans un message ou un échange mais ça me paraît un peu obscène et aussi violent, dans un bouquin de type témoignage. Mais je te dis ça comme je le ressens jusqu’à présent.

    J’ai un rapport mystique à l’écriture depuis l’enfance. Je ne peux pas écrire une histoire sans l’avoir auparavant visualisée, entendue comme face à un écran ciné ou à une scène de théâtre, mais dans ma tête. Une histoire m’habite avant d’être écrite durant un long moment, et j’écris ce que chaque personnage que je vois et entends, dit et fait et pense, comme je le vois intuitivement. Je me laisse juste guider et tout s’écrit de façon fluide ensuite; et parce que je le vois, que je l’entends très précisément dans ma tête, je sais que ce que j’écris est dans le juste. J’ai conscience aussi des énergies bonnes ou mauvaises véhiculées par l’auteur comme par les différents personnages, l’histoire, la thématique.

    Pour moi, l’écriture peut faire du bien comme plonger les gens dans l’horreur. Que ce soit pour celui, celle qui écrit l’histoire comme les lecteurs qui la lisent. J’ai déjà réussi par l’écriture à apporter du bien-être, du positif et du renouveau à plusieurs lecteurs, lectrices via différentes nouvelles, romans. A me dynamiser aussi durant le processus d’écriture. Et ça m’a fait prendre conscience que je pouvais aussi faire du mal par opposition (qui peut le bien peut le mal).

    Donc du coup, comme je déteste faire du mal à qui que ce soit, j’hésite à aller au bout d’une histoire très glauque que j’ai écrite entre 2005 et 2013 sous forme de thriller, traitant en partie de crimes sexuels sur mineurs, de meurtres et d’emprises psychologiques, de manipulation. J’ai bloqué au moment où les personnages antagonistes qui symboliquement représentent mes agresseurs réels, commencent à s’entretuer et à démultiplier une espèce de folie psychotique et meurtrière. J’ai eu l’impression de régler mes comptes d’une façon symbolique avec un de mes agresseurs dans le dernier chapitre que j’ai écrit complètement. Mais j’ai très peur de faire du mal à quelqu’un avec ce type de texte si je termine le roman et que je le fais publier. Comme si les personnages antagonistes de mon roman pouvaient, simplement parce qu’ils représentent mes agresseurs réels, faire du mal à mes lecteurs ou continuer de me faire mal à moi sous une autre forme. C’est sans doute une frayeur infondée, mais c’est ce qui constitue le noeud gordien de mon blocage qui m’a fait stopper l’écriture de ce thriller il y a 6 ans environ (alors que j’ai scénarisé la fin via un synopsis précis) et que j’ai écrit les 3/4 complètement et même corrigé ces parties. Je me suis pourtant fait des tests en publiant le roman comme un feuilleton sur un site d’écriture pour romanciers amateurs, mais je n’ai pas pu finir la rédaction ni faire la publication des derniers chapitres (j’en ai trois ou quatre à écrire), même après de très bons retours lecteurs pour l’ensemble du récit et des épisodes publiés (une trentaine).

    Donc tu vois, je ne suis pas du tout courageuse.

    Pour débloquer, j’ai écrit et partagé d’autres choses en parallèle: des contes, des nouvelles, mais sur des thématiques plus douces, plus légères, humoristiques aussi. Et ça m’a fait du bien et pour celles et ceux qui les ont lues, ça leur a fait du bien aussi. J’ai eu de très beaux retours dont un tout récent, qui me confortent dans le fait que ce que j’écris a du sens, touche et fait du bien. Du coup, je me dis que si j’écris et publie la fin du thriller, je vais provoquer une catastrophe, du mal-être, de mauvaises choses. Donc je retiens les mots. Ca sort pas. Et me forcer reviendrait à me violer moi-même.
    Donc…dur dur d’écrire sur tout ça…même avec une histoire sans rapport, des personnages complètement extérieurs à mon vécu, dans une époque différente, un univers différent. Même si le roman fiction permet une certaine distanciation d’avec un vécu très dur en en parlant de façon détournée et indirecte, ça reste une démarche très difficile pour moi.
    Et ce serait encore pire dans un livre-témoignage.

    Je ne sais pas ce qui finalement fera sauter le verrou et me permettra de débloquer l’écriture où elle en est restée. Je relis souvent et régulièrement les derniers chapitres du thriller. Mais après, je fuis, je retourne compléter d’autres écrits…comme si je n’arrivais pas à dépasser mes angoisses.

    Ca t’est déjà arrivé un truc de ce genre?
    Quel rapport tu as à l’écriture de ton côté?

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  3. Et bien moi, contrairement à toi, je peine à me confier comme tu le fais ici. Ecrire son histoire dans un livre, lorsqu’elle fut douloureuse et l’est encore, ne peut à mon sens se faire que de manière progressive. Il y a comme des étapes à passer, des résistances à lever. L’écriture aide, jusqu’à un certain point, et puis ça bloque. D’où la nécessité de dire (révéler) les choses de manière progressive, sur plusieurs livres. Moi, il m’a fallu un temps fou pour oser me dire un peu. Mais c’est de l’ordre de la nécessité vitale. Alors, on reprend encore, avec plus d’audace à chaque fois.

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    1. C’est fou. En lisant ton blog, on a plutôt l’impression que tu es très à l’aise pour te confier.
      Comme quoi tu vois, les apparences sont trompeuses, finalement.

      De mon côté, j’ai eu très tôt l’intuition que dire les choses franco de porc, me sauverait toujours du pire. Ca s’est vérifié tellement de fois dans l’enfance, l’adolescence, la jeunesse que du coup, c’est devenu un réflexe.
      Donc j’ai pas de souci à parler des choses y compris difficiles dans un échange écrit ou verbal.
      Ca ne me pose pas de problème. Par contre, y consacrer un ouvrage, ça me paraît pas nécessaire ni vital. Y faire allusion par le biais d’une fiction romanesque et des personnages imaginaires me suffit, je crois.
      J’ai plus tendance à réserver ce qui pourrait ressembler à un témoignage, à une démarche thérapeutique psy ou à une démarche militante de type associative. Parce que pour moi, ça me paraît plus constructif.
      Le travail d’écriture pour moi doit rester un plaisir, un jeu, pas une douleur ou une espèce de déversoir. Et j’ai vraiment du mal avec l’autofiction.

      Pour moi, l’écriture, c’est le roman, la nouvelle, la poésie, le théâtre, l’essai, le conte. C’est sous ces formes que j’aime écrire et lire. Et je crois aussi que je n’ai pas envie d’exister à travers mon trauma. Je veux exister par le style, la qualité d’écriture, l’histoire, la profondeur du récit, les personnages que je mets en scène, l’humour, la poésie, ma sensibilité artistique, mon coup de crayon, de pinceau, etc. Je ne veux pas que les gens m’associent en tant qu’artiste à l’inceste que j’ai subi. Ca reviendrait pour moi à me remettre sous emprise de mes agresseurs. Tu vois le truc?

      Merci pour le lien sur Adélaïde. J’en avais entendu parler mais j’avais pas vu cette présentation.
      Je ne sais pas si tu connais ce spectacle mais j’ai adoré les chatouilles d’Andrea Bescond. C’est une forme qui correspond je pense davantage à ce que je ressens et qui sort aussi du témoignage pour en faire autre chose:

      https://www.theatre-angouleme.org/programmation/les-chatouilles-ou-la-danse-de-la-colere/

      Par contre, tu vois, je n’aurais pas adapté la pièce en film. Ca pour moi, ça passe pas.
      Quand on a vécu un tel drame, et qu’on le fait jouer ensuite à un enfant, interpréter, ça me paraît ultra violent et complètement abusif, même si c’est dans le cadre du jeu d’acteur et bien encadré, bien réalisé, bien expliqué.
      J’ai eu le même souci avec Eva Ionesco et son My little Princess au cinéma.

      Tant qu’un film sur le sujet ne travaille qu’avec des adultes, comme Festen de Vinterberg par exemple qui est hyper fort sur l’inceste, ça me parait clean et efficace.
      Mais quand des enfants entrent en scène, ça me dérange.

      Et pourtant, ça m’est arrivé que des jeunes ados, mais aussi des enfants de 8, 10 ans me posent des questions sur le sujet des crimes d’adultes sur enfants et que j’ai pas eu de mal à leur répondre, faire une pédagogie autour des aides et numéros verts, ressources juridiques, psy existants. Mais c’est pas pareil quand quelqu’un qui a vécu ces horreurs va demander à un enfant de jouer son trauma dans les situations vécues, au cinéma.
      Là, je fais un méga blocage.

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      1. Comme quoi, il ne faut jamais se fier aux apparences 😉 Chacun avance comme il peut.

        Il faut écrire le style qui nous convient. Encore faut-il le trouver. Mais, pour moi, écrire est de l’ordre de la nécessité intérieure. Si ce n’est pas nécessaire d’écrire sur telle ou telle thématique, alors je n’écris pas. L’écriture permet de se creuser et de se découvrir. C’est le sens que je lui donne.

        Oui, j’ai vu et apprécié le film « Les chatouilles ». Personnellement, je l’ai trouvé très bien joué, avec pudeur, force et finesse. A+

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  4. Bonsoir Pascal

    Je ne suis pas allée voir l’adaptation en film parce que pour moi, il y a toujours le risque que les enfants acteurs puissent être traumatisés par mimétisme. Et ça me paraît pas juste, au regard du traumatisme, qu’il soit joué par des enfants.
    Je préférais le spectacle où Andrea est seule en scène. Je trouvais la forme plus cohérente et respectueuse aussi.
    Si je comprends tout à fait que le développement cinéma corresponde à une volonté de pouvoir montrer le spectacle autrement auprès d’un plus large public, le fait d’impliquer des enfants acteurs pour jouer ce traumatisme, me dérange énormément.

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