Je pars sur les routes du vent
Je pars. Là où le souffle porte loin, à des années de ma vie d’antan. Je pars, grâce aux rencontres qui me transforment, me bouleversent, et me portent. Peu à peu, je découvre qui je suis, je sais enfin qu’il est possible de quitter sa nuit. Après la mort de l’être, les illusions, les cercles vicieux qui vous emprisonnent et semblent ne jamais devoir finir.
Je pars. Je laisse tomber le vieux vêtement qui ne m’appartient pas. J’abandonne mes illusions, mes colères, mes haines. Je les abandonne au vent, pour m’alléger sur le chemin. Je pars à la rencontre, je parle aux inconnus. Je me parle avec bienveillance, je vois mes résistances, mes blocages, mes hontes. Je me prends tel que je suis, je ne suis plus en guerre. J’ai déposé les armes, appris à me connaître et à m’aimer. Je me laisse caresser par le vent du large.
Je pars. Elle m’appelle, elle m’inspire. Elle me donne à voir de larges horizons, après les tourbillons, les gouffres et les tempêtes innombrables. Après les ténèbres profondes, voilà que la vie m’appelle. Elle me happe d’une main légère et bienveillante. Elle est là, devant moi. Elle me dit tout son amour. Pour moi, pour les autres en chemin. Rien n’est jamais pour soi, là est la merveille. Lorsque la main s’ouvre, elle peut enfin donner. La colère, la haine, la blessure enserrent le cœur. Elles étouffent notre être profond, alourdissent nos chaînes. Réapprendre à aimer, retrouver le lien, rouvrir la main.
Je pars. Ils m’appellent. Le désir, l’audace, la liberté. Avec eux, le besoin de reconnaissance s’estompe. Avec eux, je me connais mieux, je sais mieux qui je suis. J’ai moins besoin de posséder, sachant que rien ne peut se posséder. Surtout pas la vie, elle fait partie du grand fleuve. Tu peux seulement t’y baigner et t’en abreuver. Mais, elle ne t’appartient pas. Elle est don et abondance. La vie ne se force pas, elle se reçoit. L’amour est ainsi fait, il ne peut tricher. Il te fait voir tes obscurités, non pas pour te juger. Seulement pour te faire avancer, pour te laisser entrevoir un rais de lumière. Te faire quitter tes obscurités et ces chaînes qui te retiennent au passé.
Je pars. Je pars sur les routes du vent. D’audace en audace. De chemin en chemin. De remise en question en remise en question. La vie est mouvement, la vie est fluidité. La vie est profonde comme la mer, immense comme le ciel. Elle s’offre à toi à mesure que tu t’offres à elle. Elle n’a d’autres limites que les tiennes. Pour peu que tu lui abandonnes tes obscurités, elle t’offre sa légèreté bienfaisante. Alors, peu à peu, tu t’unifies, tu adhères à la vie, tu te coules dans le grand fleuve.
Pascal HUBERT
Je pars sur les routes du vent.
Venez, partons ensemble !
trop pauvre
l’instant qui s’offrait
je marchais à contresens
trafiquais de choses mortes
ou hanté par la merveille
qui scintillait
là-bas au loin
en avant en ce pays
qui appartiendrait
toujours aux ailleurs
des années à m’égarer
me fourvoyer
à m’éloigner du lieu
où se proposait
ce dont j’avais soif
mais après
tant d’errances
de ratages
de jours morts
j’ai trouvé l’accord
suis à l’unisson
avance de ce pas serein
qui se règle
sur celui de la vie
*
troppo povero
l’istante che si offriva
procedevo controsenso
maneggiavo cose morte
o assilato della meraviglia
che splendeva
laggiù remota
dinanzi in un paese
per sempre destinato
a appartenere all’altrove
anni interi a smarrirmi
fuorviarmi
a scostarmi dal luogo
i cui si proponeva
ciò di cui avevo sete
ma dopo
tante erranze
fallimenti
giorni morti
ho trovato l’accordo
sono all’unisono
avanzo co in passo sereno
che si regola
su quello della vita
Charles JULIET, Radici della luce, VALIGIE ROSSE, p. 78-79
Premio ciampi « Valigie rosse » 2012
Edition bilingue Français/Italien
a cura di Federico Mazzocchi, con une testimonianza di Mario Luzi
Charles JULIET 1
Charles JULIET 2
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