Aux ami.es facebookiens

Aux ami.es facebookiens

« Quand une personne souffre d’une illusion, on appelle cela la folie. Quand beaucoup de gens souffrent d’une illusion on appelle cela la religion. »

Richard DAWKINS

Je voudrais m’adresser ici aux grandes personnes qui font encore allégeance à leur petite religion. À celles qui, au vingt-et-unième siècle, plus particulièrement en Occident, ont pris la mesure des abus commis au nom de leur Dieu. À celles qui, plus particulièrement encore, ont été profondément blessées dans leur chair et dans leur esprit par une église à laquelle elles s’étaient entièrement dévouées, depuis très jeunes parfois. À celles donc qui restent malgré tout…

Or, la confiance donnée à autrui se mérite et l’esprit critique doit d’autant plus s’exercer s’il s’agit de notre vie, de son orientation, de notre bien-être légitime. La confiance ne saurait jamais être irréversible ou alors on ne demeure dans un système – fut-il pervers – que si l’on y trouve un avantage matériel, une sécurité affective, une communauté d’intérêts, une promesse fut-elle factice. Mais le conditionnement n’est-il pas un puissant facteur d’immobilisme ? De même que l’emprise ou la manipulation. Tous ces mécanismes de soumission, bien connus en psychologie et qui ont fort peu à voir avec la liberté de conscience, l’esprit critique, une spiritualité authentique…

Alors, venons-en à mes ami.es facebookiens, croisés le plus souvent au hasard de mes pérégrinations sur le réseau social. Je les étrille parfois, les bouscule ou les emmerde. Certains me bloquent, d’autres me remercient. Selon le ressenti de chacun, sa conception de Dieu, son rapport à la foi, son cheminement vers l’athéisme ou l’agnosticisme. Impossible de plaire à tous, de respecter les sensibilités de chacun, de jouer au caméléon pour faire plaisir. Toute idée est pour moi critiquable et la multiplicité même des religions les relègue toutes au rang de simples croyances. Relatives et mouvantes au fil des siècles, selon le coin du globe plus ou moins éclairé.

Si vous avez la foi à ce point fragile, sachez que je l’ai eue forte. Et que, pour cette raison même, ma critique est désormais à la hauteur de ma lucidité. Prendre la parole ne s’est pas fait sans peine ni sans raison. Elle a surgi d’un profond aveuglement et d’un très long mutisme forcenés. Il m’aura suffi d’être né de parents catholiques et maltraitants pour m’accrocher plus qu’un autre, peut-être, à la foi. Celle censée vous soutenir les jours de malheurs, celle qui en réalité sait vous rappeler votre médiocrité. Celle censée être source de salut, celle qui sait vous pousser un peu plus dans l’enfer de la culpabilité. Ne sommes-nous pas le fruit d’un péché originel, que savent nous rappeler ces clercs fidèles à leur prétendue Vocation tombée du Ciel ?

Voyez-vous, en apprenant à penser par soi-même et à colmater peu à peu ses brèches, le besoin de faire corps avec sa famille, sa culture, sa société ou ses croyances religieuses s’évapore. On apprend à se faire confiance, quitte à se sentir parfois bien seul. J’ai lu comme vous Varillon, Zundel, Teilhard de Chardin, Lavoué, Guillebaud, Musset, Manaranche, Légaut, Moingt, Bellet et tant d’autres encore (et même Finet, Éphraïm ou Vanier, tombés depuis en disgrâce. Avant d’autres, sans doute…) Mais, voyez-vous, ils racontent tous plus ou moins la même chose. Un Dieu anthropomorphique, fabriqué à l’image de l’homme. Loin d’être plus fiables les uns que les autres, ils ont au contraire renforcé mon esprit critique. Ce qui était censé être cru hier sous peine d’enfer n’était bien que balivernes et superstitions. Aucune génération de croyants ne méritait pourtant un tel traitement et aucune réforme ne pourra rétablir une Vérité inexistante…

Là où je me trouvais, dans une profonde confusion – tiraillé à l’extrême entre mon humanité et mon catholicisme -, un seul être a finalement su me rejoindre. Charles Juliet avait vécu à l’intime ce que je traversais. À partir même des ténèbres – avec son lot de pensées suicidaires, de prises de conscience, de déconditionnements à opérer -, cet éclaireur me montrait le chemin vers la connaissance de soi. Au fil de ses Journaux, je le voyais reprendre corps, s’unifier, se pacifier, s’humaniser. Jusqu’à célébrer la vie… Enfin, un homme qui me parlait, me comprenait de l’intérieur. Enfin un homme qui parlait à la multitude des hommes et des femmes de notre temps. Enfin un homme en qui je pouvais me fier. Il me tirerait du gouffre dans lequel j’étais tombé enfant…

Alors, peu à peu, malgré la crainte de trahir Dieu et ceux qui m’ont connu autre, j’ai ouvert d’autres livres que le « petit catéchisme » de mon enfance. Diderot, Spinoza, Voltaire, Meslier, Drewermann, Renan, Nietzsche, d’Holbach et tant d’autres. Je n’étais plus seul, d’autres en des temps parfois reculés déjà avaient eu l’audace de remettre en question les certitudes religieuses, au péril de leur vie parfois. Ces prétendus hérétiques n’étaient autres que des lanceurs d’alerte en avance sur leur temps.

Alors, je n’ai plus attendu que se réforme une énième fois la religion de ma naissance, pour m’ouvrir à celles et ceux qu’elle n’a jamais su véritablement aimer et honorer. La femme bien sûr et son légitime désir d’émancipation, les homosexuels entre autres et leur droit à la différence, les innombrables victimes des clercs et tant d’autres. Bref, tous ceux et celles qui n’ont plus pu professer l’enseignement officiel ou ont simplement tenté de briser l’omerta. En abandonnant une église prétendument « universelle », je me suis ouvert à l’humanité entière.

Ce changement de paradigme est inéluctable, autant qu’universel. Voyez en islam – après une lecture littéraliste du Coran soi-disant incréé et les mêmes dérives obscurantistes -, des hommes et des femmes éclairés se lèvent pour dénoncer les crimes commis au nom de leur prophète. Pour refuser encore leur soumission à l’Oumma et à leur religion de naissance. Ainsi de Daoud, Sansal, Zineb, Benhabib, Al-Husseini, Djavann, Adonis, Nasreen et de tant d’autres déjà. Après la foi de leurs ancêtres, advient la raison universelle…

Aujourd’hui, à la suite de cette longue cohorte déjà, mon besoin de liberté est immense. À la mesure de mon étouffement et des superstitions millénaires proférées par de véritables escrocs religieux. Alors aujourd’hui, mes mots sont parfois tranchants et sans appel. Ce qui fait dire à certains que je serais devenu aussi intolérant que ceux que je dénonce, que la raison serait mon nouveau Dieu ou encore que je « jetterais le bébé avec l’eau du bain ». Je vous le dis sans détour : vous faites encore partie du système religieux qu’il vous arrive parfois de dénoncer. L’histoire, elle, démontre amplement que foi et raison n’ont jamais fait bon ménage. Et que garder désormais la raison pour seule boussole ne fait ni de moi un intolérant ni même un athée, seulement un agnostique qui ne croit plus dans le Dieu des religions…

Ainsi, après d’âpres chemins de traverse, advient le constat cinglant que l’Église n’était qu’une secte parmi tant d’autres. Et que, par fidélité à soi, il est temps de la quitter désormais. Mais aussi de la dénoncer sans faillir – fusse avec véhémence parfois -, pour ce qu’elle a toujours été en vérité : une imposture qui n’a que trop duré…

Pascal HUBERT

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