MES AMIS SONT PLUS QUE MOI
Mes amis ne sont pas des clones. Ils vivent sur leur propre chemin de vie, et moi sur le mien. Cela m’importe au plus haut point, tant j’ai connu la dépendance maternelle jusqu’à la fusion où votre propre désir vient se mourir. Cela dit, une chose est sûre. D’une façon ou d’une autre, chacun de mes amis a été contraint de visiter le gouffre qui s’était creusé en lui et faisait de sa vie un enfer sur terre. Fini de se divertir, de se fuir encore, de jouer sa survie derrière le masque mensonger des apparences. C’est le temps de la vérité qui dénude jusqu’au tréfonds. Dans le fond, mes amis ont en commun leur vérité et leur singulière richesse qui ne demandent qu’à se donner et à se déployer.
Pour le reste, ils sont bien différents de moi, ce qui les rend par là même uniques et irremplaçables, et me contraint parfois à de douloureuses et salutaires remises en question. Ils ne sont pas moi et sont un autre-moi. Ils m’inspirent, me percutent, me bouleversent. Ils m’effraient, me triturent, me renvoient à l’irrésolu, à la blessure originelle, aux désirs inassouvis, à l’enfance souvent.
Peu à peu, avec le temps, très lentement, lorsque la confiance naît et que la peur finit par refluer, ils deviennent ma respiration, ma part d’humanité et de vie, cette part essentielle pour renaître. Ils sont pour moi l’invraisemblable, l’indicible, le lien détruit qui se renoue, l’inaccessible devenu réel. Ils me font exister pour moi-même, non plus sur autorisation. Ils ne me doivent rien et je ne leur dois rien.
Et, lorsqu’il s’agit d’une amie, c’est là un lien plus indicible et invraisemblable encore. C’est l’Autre que je rejoins enfin, c’est l’Autre qui par moment comble ma faim, ma solitude et mes angoisses. C’est la femme qui répare ce que la mère n’a su donner. Cette part de tendresse et de bienveillance, cette part de complicité et de parole entendue, cette part de mots jusqu’alors tabous et qui accouchent enfin d’un long silence, d’un mortel héritage trop longtemps enfui. L’amie est un don venu du fond de mon désarroi, une hôte que pour rien au monde je ne voudrais piétiner. Elle est ce que je ne suis pas et, par là même, elle me révèle et me reconstruit à la jointure de l’être.
Et je sais que, pour l’amie aussi, ayant l’un et l’autre traversé notre commune humanité blessée, je deviens à mon tour sa part manquante, trop longtemps piétinée. Cette part qui peut enfin exister pour ce qu’elle est en vérité. Cette part singulière que les blessures infligées, parfois depuis l’enfance, ont conduit au fond du gouffre. Peu à peu, lentement, patiemment, lorsque la confiance naît et que la peur de se dire reflue enfin, comme pour tout lien détruit à la racine, l’un et l’autre découvrons ébahis, tels des nouveaux nés, que l’amitié authentique, d’égale à égale, se joue des différences autant qu’elle s’en nourrit. Elle est cette alchimie qui chaque jour renouvelle notre quotidien, nous émerveille et nous fait grandir. Contre toute attente, elle existe, sans raison, si ce n’est celle surgie du cœur profond.
Et nous voilà riches de ces rares amitiés. Lorsque l’imaginaire n’a plus prise, que le réel survient enfin. Après cette commune et interminable traversée de tous les dangers. Il n’était d’autre chemin pour exister, n’est-ce pas ?
Les amis, c’est la vie. La vie impossible qui devient à peine croyable…
Pascal HUBERT
My friends are most like me
My friends look like me but they are not clones. They live their own life path and I live mine. It is something of the utmost importance to me, since I knew the maternal dependence until the merger, which is where your own desire comes to die.
That said, the truth is that, in some way, each of these friends was forced to visit the abyss that had been dug within them, a bottomless pit that had turned their lives into hell on Earth : no more entertainment, inability to flee, inability to survive hiding behind some mask of respected appearances.
It is the time of naked truth that opens to the depths.
Basically, my friends have in common their authenticity and their unique richness that they are eager to display and offer. For the rest, they differ from me, which makes them unique and irreplaceable beings, which sometimes forces me to a painful and healthy questioning: they are not me and they are… other me ! They inspire me, they impact me, they upset me… they scare me, they crush me, they return me to the unresolved, to the original wound, to frustrated desires, to childhood often. Little by little, over time, very slowly, when trust settles and fear finally recedes, they become like a breath, my part of humanity and of life, that essential part to be born again. For me, they are the improbable, the unspeakable, the destroyed link that is rebuilt, the inaccessible made real. They make me really exist for me, no longer « with permission. » They don’t owe me anything and I don’t owe them anything either.
When it comes with a girl friend, it is an even more inexpressible and improbable bond : she is the alter ego with whom I finally meet, she is the one who (sometimes) satiates my hunger, calming my loneliness and my anguish. She is a woman who comes to repair what my mother could not give. This part of tenderness and benevolence, this part of complicity and a well-received word, this part of taboo words until then, can come from a long silence, from a mortal inheritance so long buried. The girlfriend is a gift that emerges from the depths of my dismay, a guest whom I wouldn’t above all to humiliate never. She is what I am not and that, therefore, reveals myself and reconstructs me in the conjuncture of the living being. I know that, with a girlfriend, having both crossed our shared wound’s humanity, I am going, then, to become her missing part, so long trampled on.
This part that at last can exist as what it really is : that singular part that wounds inflicted have carried to the bottom of the abyss, from childhood, sometimes !
Little by little, patiently and slowly, when trust is born and the fear of telling evaporates (as with any bond destroyed at the root), we then discover, as newborns we are, amazed, that genuine friendship, in strict equality, not only plays with differences but feeds on them. It is this wonderful alchemy that renews our daily life, amazes us and makes us greater. And it comes against all expectations, without reason, except that which arises from the deep heart.
“My friends are most like me” by Pascal HUBERT (Belgian author)
Victor Khagan translates.
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Auteur de romans, nouvelles, poésies et essais « Rebelles homéostasiques », http://www.monpetitediteur.com
Mis amigos se parecen a mí
Mis amigos se parecen a mí pero no son clones. Viven en su propio camino de vida y yo en el mío. Es algo de suma importancia para mí, ya que conocí la dependencia materna hasta la fusión, que es donde viene a morir tu propio deseo.
Dicho esto, lo cierto es que, de alguna manera, cada uno de estos amigo/as se vio obligado a visitar el abismo que se había cavado dentro de ellos, un pozo sin fondo que había convertido sus vidas en un infierno en la Tierra : no más entretenimiento, imposibilidad de huir, incapacidad para sobrevivir disimulandose detrás de alguna máscara de apariencias respetadas.
Es el tiempo de la verdad desnuda que se abre hasta las profundidades.
Básicamente, mis amigos tienen en común su autenticidad y su singular riqueza que están ansiosos por desplegar y ofrecer. Por lo demás, difieren de mí, lo que hace de ellos seres únicos e insustituibles, lo que a veces me obliga a un cuestionamiento doloroso y saludable : ellos no son yo y son… otros yo ! Me inspiran, me impactan, me trastornan… me asustan, me trituran, me devuelven a lo irresuelto, a la herida original, a los deseos frustrados, a la infancia a menudo.
Poco a poco, con el tiempo, muy despacio, cuando la confianza se instala y el miedo finalmente retrocede, se convierten en un aliento, mi parte de humanidad y de vida, esa parte esencial para volver a nacer. Para mí son lo improbable, lo indecible, el vínculo destruido que se reconstruye, lo inaccesible hecho real. Me hacen existir realmente para mí, ya no « con autorización ». No me deben nada y yo tampoco les debo nada.
Cuando se trata de una amiga, es un vínculo aún más inexpresable e improbable : es el alter ego con quien finalmente me reúno, es quien (a veces) sacia mi hambre, calmando mi soledad y mis angustias. Es una mujer que viene a reparar lo que la madre no pudo dar. Esta parte de ternura y de benevolencia, esta parte de complicidad y de palabra bien acogida, esta parte de palabras tabú hasta entonces, puede parir de un largo silencio, de una herencia mortal tanto tiempo enterrada.
La amiga es un regalo que emerge de lo más profundo de mi consternación, un huésped a quien no quisiera sobre todo humillar. Es lo que no soy y que, por ello, me revela a mí mismo y me reconstruye en la coyuntura del ser vivo. Sé que, para la amiga, habiendo cruzado ambos nuestra humanidad de herida compartida, voy yo, entonces, a convertirme en su parte faltante, tanto tiempo pisoteada.
Esta parte que puede existir, al fin, por lo que realmente es : aquella parte singular que las heridas infligidas han llevado al fondo del abismo, desde la infancia, a veces !
Poco a poco, con paciencia y despacio, cuando nace la confianza y el miedo a contarse se evapora (como ocurre con cualquier vínculo, destruido de raíz, ambos descubrimos entonces, como recién nacidos, asombrados, que la amistad genuina, en partes iguales, no solo juega con las diferencias sino que se alimenta de ellas. Es esta alquimia maravillosa la que renueva nuestra vida diaria, nos asombra y nos engrandece. Existe en contra de toda expectativa, sin razón, salvo la que surge del corazón profundo.
« Mis amigos se parecen a mí » de Pascal HUBERT
Victor Khagan translates.
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