Libre échange : « Marthe Robin : mystique ou hystérique ? »

Libre échange

« Marthe Robin : mystique ou hystérique ? »

Avec Yolande DU FAYET DE LA TOUR, Gestalt thérapeute, certifiée en psychopathologie phénoménologique

et

Claudine JOURDAN, psychologue clinicienne, psychothérapeute agréée par l’ARS Bretagne

Marthe Robin, née le 13 mars 1902 à Châteauneuf-de-Galaure (Drôme) et morte dans la même ville le 6 février 1981, est décrite par certains comme étant une mystique catholique française, fondatrice des Foyers de Charité, connue pour des phénomènes tels que des visions religieuses, des stigmates et l’inédie que lui attribuent divers membres de son entourage.

Pour divers observateurs médicaux, son cas serait toutefois l’expression d’un trouble psychique de type hystérique.

Qu’en pense nos deux intervenantes ?

PARTIE 1/2

PARTIE 2/2

LIENS BIBLIOGRAPHIQUES :

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25 réponses sur « Libre échange : « Marthe Robin : mystique ou hystérique ? » »

  1. Communiqué du Père Pierre Vignon (qui n’attend pas de réponse) :

    Il est tout à fait possible de discuter sur le cas de Marthe Robin à condition d’avoir les éléments en mains, ce qui n’est pas le cas de ces deux dames. L’ensemble de la positio dément ce qui est proféré dans les vidéos comme erreurs de lectures et comme « à peu près » du diagnostic. Marthe était alitée sur un divan qu’elle s’était fait faire. Si on me permet un peu d’humour, pas étonnant que les psys soient attirés et intéressés. Cependant, devant ces médecins dignes du Malade Imaginaire, je me borne à constater que Marthe ne s’y trouve plus et que leur consultation post mortem tombe totalement à plat. En disant cela, je ne désire pas les offenser ni dire qu’elles ne sont pas sincères, mais que, pour disserter, il faut savoir de quoi on parle. C’est la peine que je me suis donné pendant plusieurs mois en me plongeant à fond dans une authentique documentation. Je n’ai pas l’intention de répondre point à point à chaque approximation ou erreur qui est dite. Mon livre le fait et ça n’est pas mon rôle maintenant ni le lieu de le faire. Je ne ferai pas d’autre commentaires pour éviter la polémique. Il fallait que je réagisse un minimum. Et maintenant, que chacun parle autant qu’il le souhaite ! Marthe Robin nous échappe à tous. Je pense à propos d’elle à la chanson de Guy Béart, « Ma petite est comme l’eau » : « Courez, courez, vite si vous le pouvez, jamais, jamais, vous ne la rattraperez ! »

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  2. Si Marthe n’est pas un Messie cloué sur la Croix, elle reste une contemplative au pied de la Croix. Comme Marie la mère de Jésus, comme Marie-Madeleine . Et les foules accablées viennent chercher l’espérance d’un salut. Et la foi et la prière de Marthe, plus ses qualités humaines ont beaucoup aidé ces gens. Mais il y a aussi la cohorte des curieux qui viennent « voir  » le merveilleux qui se raconte à son sujet.

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  3. Ce que Yolande explique très bien c’est que Marthe avec son extrême empathie, sa suggestibilité a fait sienne les souffrances du Christ qu’elle contemple au point que son corps en est marqué. Pas sûr qu’elle en joue. Mais cet extraordinaire là validé par la théologie mystique des scolastiques détourne le regard des visiteurs vers elle plutôt que vers le Christ. Et c’est ça que je dénonce. Il n’y a pas de mauvaise intention…

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  4. « Cependant, devant ces médecins dignes du Malade Imaginaire, je me borne à constater que Marthe ne s’y trouve plus et que leur consultation post mortem tombe totalement à plat.  »
    Voilà comment sont traitées les femmes qui osent s’exprimer.
    Pour ma part j’ai un master 2 de psychopathologie clinique de l’adulte. La thèse de l’hystérie de Marthe Robin est soutenue à Rennes 2.
    Bien sûr ces gens sont ignorants des thèses obscurantistes et moyenâgeuses de la scolastique.
    Idem pour la mise en cause par Pierre Vignon du témoignage de 26 femmes qui ont eu à se plaindre des agissements de Georges Finet.
    Les victimes du père Preynat sont des garçons. Tout comme ceux de Patrick Le Gac à Saint Bonnet.
    La parole de 26 femmes…pensez donc ! Elles racontent des histoires.

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    1. En reprenant à son compte ce passage de l’Annonce faite à Marie  » de Paul Claudel :
      « Si le mâle est prêtre, il n’est pas interdit à la femme d’être victime  » elle illustre cet exposé de Romuald Hamon.
      Si la femme privée du phallus ne peut s’identifier au Christ prêtre, elle peut se revêtir des attributs phalliques du Christ qui est aussi victime : ses stigmates.
      Tout cela est faux, nous sommes tous prêtres prophètes et rois, appelés à vivre la fraternité.

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    1. Excellente analyse de Bernadette Lescoffit-Lorenzo. Elle voit dans les Passions de Marthe un masochisme subi de la part d’une Dieu pervers. Masochisme et sadisme font partie de ce que la psychanalyse appelle des perversions, à côté de l’exhibitionnisme, du voyeurisme, de la pédophilie de la zoophilie etc…

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  5. « La jouissance du névrosé est liée à la parole. Le psychosomatique est le seul dont la jouissance s’inscrit sur l’organisme. Il y aurait réalisation de l’objet a sur le corps. Du fait de l’absence de métaphore paternelle surgirait un nom fabriqué avec de la jouissance – de la jouissance corporelle –, traduction de la souffrance psychosomatique. »
    Un ancien postulateur de la Cause, Bernard Peyrous, confirme dans son dernier livre paru en mars dernier que Marthe a connu la rumeur qui courait sur son origine. Cette découverte a pu provoquer un ébranlement psychologique.
    Il y a eu forclusion du nom du père, ce qui introduit à la notion de psychose. Peut-être que si cette découverte a été un peu tardive la structure de personnalité était déjà construite et l’on est dans le registre de l’absence de métaphore paternelle.
    Son père putatif lui reprochait d’être une bouche à nourrir. Cette bouche s’est fermée. Son père avait cloué sur la porte de la maison une croix vide : il a fait remarquer que la Croix était vide. Marthe a dit : nous on s’y mettra. Dans l’anéantissement qu’a été la découverte de son origine, Marthe aurait pu sombrer dans une psychose mélancolique. Elle s’est raccrochée à la parole du père : il n’y a personne sur la Croix. Elle s’est mise sur la croix. Les stigmates étant alors psychosomatiques et non conversion hystérique.

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  6. Par contre si il n’a jamais été question pour elle d’origine adultérine comme l’affirme la famille, on reste dans le registre de la conversion hystérique.

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  7. Faute d’avoir pu examiner Marthe Robin de son vivant, ni les médecins, ni les psychologues, ni les psychanalystes ne peuvent établir un diagnostic définitif. Mais ce contre quoi tous ces soignants s’insurgent c’est contre cette théologie mystique catholique perverse qui veut canoniser le masochisme des victimes et le sadisme du Dieu qui les torture et qui n’est pas le Dieu de Jésus Christ

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  8. « Lié au Salut par l’Amour, le charisme des stigmates de la Passion du Christ porte en lui ce qui fait l’essence même du catholicisme. C’est dire les enjeux spirituels qui sont à l’œuvre dans sa reconnaissance et sa défense. Ceux qui en contrefont ou démentent la nature divine ne l’ignorent pas car ils peuvent endurer les foudres de l’Église. »

    LE PADRE PIO, UNE MÉLANCOLIE MAGNIFIÉE PAR LA RELIGION CATHOLIQUE

    Romuald Hamon

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  9. De Sophie Guex, actuelle postulatrice de la cause dans le magazine l’Alouette
    « Le pape François ose même aller plus loin. Il vient
    de nous rappeler, dans sa récente lettre sur saint
    Joseph, que pour faire de nous des saints, Dieu ne
    s’appuie pas sur nos forces et nos talents, mais au
    contraire sur nos zones d’ombres et nos fragilités.
    « L’histoire du salut s’accomplit en “espérant contre
    toute espérance“ (Rm 4, 18), à travers nos faiblesses.
    Nous pensons trop souvent que Dieu ne s’appuie
    que sur notre côté bon et gagnant, alors qu’en réa-
    lité la plus grande partie de ses desseins se réalise à
    travers et en dépit de notre faiblesse 8
    . »
    Pour le dire autrement : au Japon, un art tradition-
    nel consiste à recoller des céramiques brisées non
    pas avec une simple colle, comme nous le faisons,
    nous, en essayant de faire disparaître le plus possible
    les traces de la fêlure, mais avec de l’or… Elles n’en
    deviennent que plus précieuses ! C’est aussi de cette
    manière que le Seigneur travaille notre humanité,
    lorsqu’elle a été endommagée… Dieu est cet Artiste
    qui, par « l’or » de sa grâce, peut recoller la fragile
    poterie brisée, en la rendant infiniment plus pré-
    cieuse. En contemplant le résultat, l’idée ne nous
    vient plus d’essayer de cacher les traces de fêlure,
    puisqu’elles sont devenues les éléments d’une nou-
    velle beauté.
    Si Marthe a pu être ce témoin efficace de la misé-
    ricorde de Dieu, si elle a pu « laver les pieds de
    l’église » à son époque, comme l’a si bien exprimé
    un prêtre, c’est parce qu’elle-même avait profon-
    dément fait l’expérience de sa propre fragilité et
    de la miséricorde divine. La « sainteté » dont elle
    témoigne n’est pas une sainteté d’action, comme
    celle de Don Bosco ; elle n’est pas non plus une
    sainteté caritative, comme celle de Mère Teresa ; sa
    « sainteté » se manifeste dans les profondeurs de
    son humanité. A partir d’une situation humaine
    et contextuelle compliquée, elle a avancé dans la
    voie de l’union à Dieu et du don d’elle-même par
    amour. En la reconnaissant « vénérable », l’église
    nous indique que l’union à Dieu est possible dans
    toutes les situations et qu’il se donne à nous dans
    notre pauvreté humaine, même si notre chemin a
    été biaisé par nous-même ou par d’autres. « Dieu
    est plus grand que notre coeur. » (1 Jn 3, 20.)
    La vie de Marthe Robin est plus belle que la
    légende et les quelques amplifications ou réduc-
    tions qui ont pu l’accompagner. Le travail de la
    grâce, de l’Esprit Saint, en elle comme en chaque
    baptisé, cisèle, élague et développe, appauvrit et
    enrichit ; en un mot, il simplifie un être humain
    pour que, dans son humanité, il ou elle soit rendu
    conforme à Jésus Christ. C’est ce que l’église
    appelle : la sainteté.  »
    L’Alouette N°323 | FEVRIER 2021 – 21
    ◗ dossier | 2021 : Année du 40ème anniversaire du décès de Marthe Robin
    8) François, Lettre apostolique Patris corde.

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  10. Opinion personnelle :

    Avec Marthe Robin, nous demeurons évidemment dans une vision sacrificielle de la vie. Souffrir pour le salut du monde corrompu à la suite du péché originel. Marthe s’inscrit parfaitement dans la doxa catholique, ce qui lui permet de trouver un sens inespéré à sa souffrance. Conforme à la Tradition, elle a donc reçu le titre de « Vénérable ». Avec l’église, il ne s’agit jamais en fait d’exalter la vie, mais de se reconnaître pécheur. Avec le sentiment de culpabilité que cela peut générer, selon la plus ou moins grande compliance de chaque croyant à la théologie expiatoire. La plupart des croyants, heureusement pour leur santé psychique, font désormais le tri entre ce qui leur convient et ce qu’ils trouvent désormais obsolètes… Finalement, on voit bien qu’il ne s’agit que d’une représentation mythique de dieu, selon l’époque et nos connaissances. L’imposture pour moi provient de cette vision falsifiée d’un dieu anthropomorphique, conçu à notre image, selon nos projections infantiles, lorsque les anciens pensaient encore que dieu était au ciel et les humains sur terre, qu’il y avait le bien et le mal, le ciel et l’enfer, que dieu se trouvait dans ce que nous ne comprenions pas encore (le dieu « bouche-trou » !), etc. On ne peut faire du vrai avec du faux. Il faut changer de paradigme, abandonner ce « vieux monde mental » hérité du passé et cesser de voir du « surnaturel » tiré d’un christianisme sacrificiel… Il est vrai que le clergé ne saurait admettre pareille révolution, sous peine de devoir remettre fondamentalement en question sa propre vocation telle que censée voulue par dieu lui-même… ! Au final, c’est toute la doxa catholique qui tomberait en pièces et l’église, sous prétexte de détenir la Vérité, n’est évidemment pas disposée à disparaître, tout au plus se voit-elle contrainte de se réformer pour ne pas mourir… D’ailleurs, le clergé, d’une manière générale, ne s’y trompe pas : peu nombreux sont ceux qui s’aventurent sur le terrain glissant de la reprise littérale par l’église des vieux mythes païens . A commencer par le mythe du péché originel et tout l’édifice sacrificiel construit autour. On comprend pourquoi…

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    1. Le paradigme est déjà là, Pascal.
      L’institution se sait en fin de parcours au sens crédibilité. Ce qui domine en terme d’état d’esprit respire le sectaire, le fondamentalisme, sorte de co-morbidité prise en sadisme et masochisme, honte, culpabilité et désordre identitaire.
      De plus en plus de croyants comprennent et analysent mieux les paradoxes institutionnels que le clergé lui-même, empêtré dans ses contradictions et sa politique du secret.
      Tu connais les habits neufs de l’empereur d’Andersen: nous en sommes au défilé de l’empereur-institution sur lequel les croyants s’exclament, à l’instar du petit garçon dans la foule: mais il est tout nu…Et l’empereur continue de marcher ainsi comme s’il était royalement vêtu, pour ne pas s’avouer à lui-même qui il est vraiment.
      C’est manifeste dans le déni face à la pédophilie cléricale, c’est manifeste dans les circonvolutions pour continuer de défendre et maintenir des communautés dérivantes sectaires, pour continuer de faire marcher le commerce des saints et bienheureux, pour ne surtout pas s’interroger sur des comportements criminels et abusifs passés dans couvents prisons et colonies pénitentiaires, instituts et orphelinats, sur la protection des nazis et oustachis, sur les associations de circonstance avec différentes mafias et groupes terroristes, etc, etc…

      Marthe est surtout un enjeu pour un lobby de notables et de religieux et d’une communauté dérivante sectaire, qui visent au travers de sa béatification, des postes à responsabilités, de l’argent, des profits à différents niveaux.
      Et pour l’institution cléricale romaine, c’est un objet marketing rentable.
      Qui sert effectivement une doxa doloriste qui plaît à la frange la plus réactionnaire du clergé, majoritaire à ce jour au sein de la Curie.
      Peu importe que Marthe soit réellement mystique ou pas. L’essentiel pour l’institution c’est l’argent qu’elle rapporte. Et comme elle en a déjà rapporté…il n’y a pas de raison que ça change.

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  11. « Il y a en nous de nombreuses instances psychiques, des terrains fort différents,
    s’ignorant les uns les autres. L’effet du dialogue intérieur peut venir d’une division
    interne, de la partition Moi- Surmoi négatif, de la survivance de l’illusion narcissique
    au plan de l’ Ideal du Moi, pour assurer une toute-puissance infantile, même dans une
    position apparemment passive.
    Le discernement nécessaire pour distinguer folie et expérience mystique authentique peut se faire a partir de la lecture des composantes psychiques de la vision :
    vont-elles dans le sens d’une structuration de vie, de création, de santé? ou, dans une
    perspective théologique, correspondent-elles à une spiritualité de Résurrection et de
    Joie? ·
    La théologie mystique catholique a louangé longuement les positions masochistes.
    Après cent ans de psychanalyse et d’éclairages profonds sur le fonctionnement de
    l’inconscient, il n’est plus possible de maintenir cette position; elle est déjà une cause
    nouvelle· du déclin des christianismes. Il n’est plus possible de présenter sans critique, comme le fait François Varillon, cette phrase de Thérèse Martin dont l’optique a tant influence Marthe :
    « J’ai ·trouvé le bonheur et la joie sur la terre mais uniquement dans la souffrance … « .
    La Madeleine de Janet est étonnante par sa prise de conscience, sans doute à cause
    du contact fréquent avec son psychiatre, philosophe. Lorsqu’elle .est crucifiée toute
    une nuit, elle dit: « Comme je suis honteuse d’être si heureuse à ce moment-là ».
    Sans doute, a-t-elle une intuition que la jouissance masochiste n’est pas la Joie: celle
    du Christ sur la Croix qui parle du bonheur de Dieu à son compagnon de torture, le
    « bon larron ».

    La jouissance est effloraison directe de Ia libido, forme psychique de l’instinct
    sexuel. La joie de Jésus martyr suppose d’abord toute une métabolisation des énergies libidinales, un abandon de Ia quête de Ia jouissance narcissique, un engagement
    des richesses de toute Ia personne dans le témoignage. ·
    C’est pourquoi toute une littérature de !’intelligentsia occidentale, concernant Ia
    jouissance chez les femmes mystiques, ne dépeint qu’une étape de Ia mystique
    authentique ou sinon que des effets de Ia pathologie dans des préoccupations dites
    mystiques.
    Marthe n’a pas nos soucis de vérité psychologique ni nos connaissances plus ou
    moins éclairées par Ia · psychanalyse. En toute innocence, elle vit ces états qui Ia
    surprennent, essaie de les intégrer dans le courant religieux de son époque, entraînée
    par son entourage, par le clergé de ce vingtième siècle. ·
    L’image du Dieu de Ia Révélation est mêlée fortement en elle à l’imago paternelle
    négative et destructive, c’est-a-dire au Dieu de l’inconscient tel que Freud I’ a
    dénoncé. Dans les profondeurs de sa psyché, ce que Ia psychanalyse nomme l’Oedipe
    vit en elle, selon Ia loi du code dicté par les instances parentales et archaïques.
    Les témoins de Ia Révélation ont tous entendu et vécu ce code, mais leur jugement,
    leur discernement a pu s’exercer; ils ont choisi Ia libération car si, par Ia loi selon
    l’Oedipe, on peut atteindre a un degré de justice, il faut obligatoirement savoir s’en
    libérer, au moins en partie, à travers les nuits psychiques, pour recevoir en soi une
    autre Paternité. Pour cette raison, étudier !’évolution psychique de Marthe parait
    fondamental, afin de mieux mesurer ce que sa destinée a de vraie coïncidence avec
    l’Evangile du Christ-Jésus, ou Ia dominante est l’Amour, le dévoilement du Vrai·
    Père, absolument pas Ia souffrance et Ia douleur infligées .par Dieu lui-même.

    Bernadette Escoffit-Lorenzo (extrait de l’article mis en lien plus haut)

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  12. Bonsoir Claudine, Yolande et Pascal

    Bien aimé votre échange avec un éclairage encore différent.
    Mais, si je peux tout à fait comprendre la curiosité professionnelle de savoir exactement quelle était la pathologie de Marthe, ce qui m’apparaît dans cette affaire particulièrement odieux et violent, est l’instrumentalisation qui fut faite de sa personne, de ses délires mystiques, par à la fois un groupe politique associé à un groupe religieux, qui acheté sa prise en charge et sa survie en échange d’une mise en scène très étudiée de ses souffrances et ses douleurs à laquelle elle s’est soumise docilement, parce qu’elle n’avait guère d’autre choix en la circonstance et qu’elle ne voulait surtout pas être à charge pour sa famille.
    Ce type d’instrumentalisation et d’exercice de domination sur une personne en situation de faiblesse et qui ne peut pas exercer librement son droit à la dignité, ça me paraît vraiment très grave, relever du pénal.

    Et ça correspond aussi à d’autres intrumentalisations similaires par le même genre d’associations de malfaiteurs: Thérèse Neumann, Padre Pio, Anne Catherine Emmerich et j’en passe et quelques autres, venus grossir pour le Vatican, le marché commercial des saints et bienheureux et rentabilisés à coups de pubs et de buzz dans la presse et différents autres médias, centres de pèlerinages et sanctuaires de ci ou de ça.

    A des époques où la psychiatrie n’existait pas, où n’en était qu’à ses débuts et avec dedans, pas mal d’apprentis sorciers utilisant le droit de correction conjugal et parental, l’hospitalisation d’office comme autant de moyens de faire des patients des cobayes et souris de laboratoire (il a fallu attendre les années 1960 en France et Jean Oury pour avoir une psychiatrie institutionnelle et une approche des malades véritablement humaniste et pas concentrationnaire et abusive, mais aussi progressivement des droits fondamentaux pour les personnes handicapées), il était fort commode pour n’importe quel ambitieux et margoulin notable civil comme religieux, d’utiliser la détresse de familles et de malades polyhandicapés très souffrants pour rentabiliser une pathologie psychiatrique sensationnaliste et déroutante, évolutive, à la mesure de leurs projets et de leurs fantasmes de domination. Que ça relève du politique, du financier comme du domaine religieux. Et si ça pouvait être les trois domaines en même temps, ça n’était que mieux.

    Malheureusement, je pense que Marthe fut de ces victimes, à la fois sacralisée et ultra violentée.
    Et ce jusqu’à sa mort. Qui constitue l’ultime mise en scène et l’ultime torture sur une femme âgée et très malade. Le summum du cynisme et de la violence. Et tout ça soit disant au nom de Dieu.
    Mais quel Dieu pourrait souscrire à de tels comportements?

    Et comment autant de gens ont-ils pu tomber dans la combine et ne pas saisir l’horreur de ce qui se jouait en réalité comme drame, danse macabre et comme abus?

    Ca c’est quelque chose qui me laisse pantoise et effondrée…

    Même chez les personnes qui ont dénoncé la supercherie (réelle), il n’y a pas l’once d’un début de considération ni de conscience d’une réalité abusive, toxique, d’ambitieux politico-intellectuelo-religieux utilisant la maladie neurologique et psychiatrique d’une femme à qui ses promoteurs ont promis le paradis et la sainteté, tout en la privant des soins médicaux qui auraient pu la soulager, l’apaiser et lui assurer une fin de vie digne et douce.

    Et franchement, d’un point de vue pénal et juridique (même si ça n’est pas mon métier), ça relève de l’abus de faiblesse caractérisé. Avec emprise pas seulement sur la malade, mais sur sa famille prise en otage d’une certaine façon.
    Et ça, c’est vraiment quelque chose que je trouve abominable. Et qui malheureusement, sans doute parce qu’il y a derrière le groupe abuseur de gros intérêts politiques, financiers et religieux, n’a jamais été dénoncé. A peine soulevé par François de Muizon il y a une dizaine d’années sans pour autant que lui-même s’indigne de ces procédés.

    De Meester démonte la supercherie mais charge Marthe alors qu’il devrait se rendre compte dans quelle situation psy, affective, sociale, sanitaire elle se trouvait (donc dans l’incapacité de pouvoir faire autre chose que suivre docilement ce qui lui était commandé et demandé car sa survie physique en dépendait). Deux sous de compassion pour une femme très malade et handicapée, embringuée dans un projet politico-religieux qui la dépassait largement, lui aurait permis de comprendre que Marthe ne pouvait pas être à l’origine de la stratégie. Mais ceux qui la dirigeaient et la géraient au quotidien, si.
    Ils en avaient la culture, l’opportunisme, les projets et l’ambition.

    Et quand je vois ceux qui montent au créneau ces derniers mois via des bouquins égotiques ces derniers temps (en dehors de Pierre Vignon qui réagit affectivement dans ce qu’on pourrait appeler une fidélité familiale), qui vont à la soupe pour se faire bien voir de l’institution, de leur communauté dérivante sectaire, et espérer conquérir postes à responsabilités et retour en grâce communautaire, je suis franchement écoeurée. Marthe est encore une fois rincée, exploitée jusqu’au trognon. Comme si elle n’était bonne qu’à ça. Comme si elle n’avait pas encore suffisamment rapporté d’argent et de bénéfices de tous ordres.

    Dieu merci, là où elle est à présent, elle peut prendre du recul et se fiche bien de tout ça.
    Mais clairement, si dans cette exploitation massive du handicap et de la maladie grave il y a quoi que ce soit de Dieu et de Jésus, c’est que franchement on ne doit pas connaître et prier le même.

    Voilà, c’était mon petit coup de gueule du jour.
    Désolée…mais là, fallait que ça sorte.

    Bien cordialement
    Françoise

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  13. Une autre histoire… Une bouche à nourrir. Une sixième grossesse non désirée. Une cinquième fille alors que le père n’a qu’un « héritier ».C’est comme ça qu’on appelle les fils nouveaux nés dans la Galaure. L’une des filles meurt à l’âge de 5 ans .Le bébé survit. Le père s’attendrit. La mère la surprotège. Et l’enfant protège sa mère, hésite à la quitter pour aller à l’école. Sa naissance a fracturé le couple parental et elle le sent. Elle surcompense son vague sentiment de culpabilité par la dévotion à Marie à un point qui agace ses soeurs. Elle est maladive. Son corps dit sa difficulté à vivre dans ce sentiment indéfini d’illégitimité à être au monde. Elle est une bouche surnuméraire à nourrir. Elle le sent. Elle le devine. Alors elle mange peu. Elle fait du charme à son père va le chercher aux champs. « Il est bon mon papa » essaie-t-elle de se persuader. Un jour son corps cède. Elle tombe. Comme la fille de Jaire. Elle dort. Dans son sommeil elle rêve. C’est peut-être un songe comme dans la Bible. Dieu vient à son secours. Il lui dit qu’elle est son enfant bien-aimée et qu’elle a du prix à ses yeux. La belle au bois dormant se réveille sous ce baiser d’amour. Mais elle revient dans une réalité toujours aussi dure. Son être se rétracte, s’anéantit , son corps se recroqueville en position foetale. Comment a-t-elle su la rumeur que le voisin jaloux a fait courir sur sa naissance adultérine. Nul ne le sait. Mais elle le sait et en parle à une amie. Elle ne peut plus être une bouche à nourrir pour son père. Elle ne peut plus manger en sa présence. Elle se nourrit des restes en son absence. L’Église s’approche de sa détresse. Son curé vient la voir lui envoie des visiteuses. Des moines capucins lui donnent une raison de vivre : imiter François d’Assise. Épouser dame pauvreté. Être crucifié par amour. Elle se réjouit de cette nouvelle légitimité. Il lui reste à l’acquérir. Elle lit les vies des mystique et les fait siennes. Elle apprend le rôle que l’Église lui a dévolu. Elle a travaillé pour vivre du métier de brodeuse. Après avoir offert ses bras en sacrifices ils se sont paralysés. Alors désormais elle vivra d’aumône . Elle attire les regards. Un homme la reconnaît. Avec lui elle fondera l’œuvre qu’elle a conçue dans sa rêverie mystique. Amour sublimé ,maternité sublimée en maternité spirituelle, rayonnement d’un bonheur. Tout est bien. Mais rendons à la névrose ce qui est à la névrose.

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  14. Précieux commentaire d’un médecin :
    LE CALAMITEUX DESTIN D’UNE PUBLICATION :

    Je suppose donc que le « bilan » auquel se réfère P. de Labriolle, c’est celui qui se limite à l’interrogatoire de Marthe Robin que Jean Guitton a jugé bon de publier en p. 61-66 de son ouvrage :

    1) Jean GUITTON, Portrait de Marthe Robin, Grasset 1985. Le philosophe écrit : « j’ai sous les yeux le long rapport fait par les maîtres qui ont examiné Marthe ». Suit la relation d’un interrogatoire, sans examen clinique. Rien n’indique au lecteur que cela ne représente qu’une PETITE PARTIE DU RAPPORT RÉDIGÉ PAR LES MEDECINS.

    En lisant J. Guitton, je fus atterrée : comment J. Dechaume avait-il pu « pondre » ce croupion d’expertise clinique ? Car j’avais été interne, en 1966, dans le service du professeur Jean Dechaume, signataire du « rapport médical ». Il était titulaire de la chaire lyonnaise de neuro-psychiatrie. Neurologie et psychiatrie étaient alors une seule spécialité. Cependant, rares étaient les praticiens qui faisaient montre d’une même compétence dans l’un et l’autre domaine. Le Pr Dechaume était considéré comme un excellent neurologue, mais sa compétence psychiatrique était moindre. Pour l’anecdote, il avait laissé un bras dans la grande guerre et il aimait éblouir ses élèves par l’extrême dextérité de sa main restante. Il avait su s’entourer d’excellents agrégés qui, en sa fin de carrière, faisaient marcher les services – eux distincts – de neurologie et de psychiatrie.

    Le second signataire, A. Ricard, était de la même promotion d’internat des hôpitaux de Lyon que J. Dechaume (1920). Ils se connaissaient donc probablement très bien et avaient traversé les grandes épreuves de 14-18 ce qui crée une fraternité. Pourquoi avait-on sollicité un chirurgien dans une expertise de ce type ?

    Après avoir découvert le rapport publié par JJ Antier (N°3 ci-dessous), j’avais écrit à J. Guitton m’étonnant de l’extrait transcrit dans son livre. Sa réponse, courtoise, m’avait convaincue qu’il n’y avait eu de sa part aucun désir de dissimulation. Mon sentiment, c’est que le philosophe était un peu « désincarné » : ces détails médicaux dont je vais ébaucher, plus bas, la transcription n’étaient vraisemblablement pas sa tasse de thé.

    2) Gonzague MOTTET, Marthe Robin, la stigmatisée de la Drôme, érès 1989. Dans sa thèse de médecine, G. Mottet se base sur le « rapport médical », tel qu’il a été publié par J. Guitton et qu’il reproduit (p 170). G. Mottet n’a évidement pas examiné M. Robin. Il fait un remarquable travail bibliographique et une dissertation brillante. Mais l’absence de données cliniques pertinentes fragilise son travail. Il discute un antécédent d’« encéphalite léthargique de Von Economo-Cruchet » (p. 17) et affirme « l’existence d’une structure névrotique de type hystérique ». Malheureusement il me semble qu’on ne peut pas prendre appui sur un travail dont les bases sont aussi incertaines.

    Aussi, grande fut ma surprise quand je découvris :

    3) Jean-Jacques ANTIER, Marthe Robin, le voyage immobile, Perrin 1991. L’auteur nous rapporte dans les pages 138-151 un examen neurologique rigoureux (eh oui les cliniciens ont bien cherché, entre autres, le signe de Babinski, puisqu’ils affirment que le cutané plantaire se fait en flexion !) Ils constatent essentiellement une « impotence des membres avec attitude et contracture ne rentrant pas dans les cadres classiques ».

    Outre un examen général complet qui déplore seulement un foie « un peu gros à la palpation », ils ont cherché formule sanguine et temps de coagulations, également normaux.

    Quant aux « stigmates », les médecins décrivent avec minutie des « taches de sang assez frais », leurs localisations. Enfin « Après avoir constaté l’existence de ces stigmates sanglants, nous avons soigneusement lavé à l’eau chaude (p140-141), avec un lige fin, le front, le visage et les mains. Toute trace de sang a ainsi disparu et nous avons minutieusement examiné la peau : elle est absolument intacte, strictement normale, (…) ne présente aucune effraction, même la plus minuscule, ni aucune trace de cicatrice ancienne. »

    Mais – hélas – les experts doivent conclure ; et c’est à partir de là, à mon avis, que les choses dérapent. Procédant par élimination, ils écrivent que « le diagnostic médical le plus VRAISEMBLABLE était celui d’encéphalite ou de maladie à virus neurotrope, mais nous n’en avons PAS APPORTE LA PREUVE ABSOLUE ». (Passant sur ces réserves, on peut lire dans de nombreux ouvrages postérieurs que les experts ont fait le diagnostic de maladie de Von Economo, affection dont ils n’ont, à ma connaissance, pas même prononcé le nom.) Quand aux « stigmates » dont on a vu l’étrange description et aux autres phénomènes « mystiques » ils leur apportent la caution de « la certitude morale qu’il ne s’agit pas, même pour une partie, de manifestations pithiatiques ».

    Finalement les experts déclarent : « .. reconnaître notre impuissance. Nous n’avons, dans l’état actuel de nos connaissances, aucun moyen scientifique d’en donner une preuve absolue. Nous nous avouons d’ailleurs incapables de classer de façon précise les contractures présentées par cette malade. Ce que nous pouvons affirmer sans aucune discussion possible, c’est qu’elle n’est pas pyramidale ou parkinsonienne, qu’elle n’entraine pas l’attitude habituelle des rigidités de décérébration. Nous ajouterons que nous n’avons jamais rencontré de contractures pithiatiques réalisant un tel tableau. Nous accepterions volontiers l’origine centrale de symptômes viscéraux et nous sommes prêts à les interpréter comme des manifestations viscérales de lésions encéphaliques. Nous croyons à la réalité des troubles de la vie végétative (nutrition et sommeil), mais nous ne nous prononcerons sur ces faits que lorsque la mise sous surveillance aura prouvé de façon absolue leur réalité. Nous affirmons la réalité des stigmates sanglants en dehors de toute simulation et supercherie, stigmates sans lésion cutanée évidente et que d’autres mettront sur le compte de troubles vaso-moteurs d’origine psychique ( ?). Nous aimons mieux reconnaître que nous ne voyons ni la cause, ni le mécanisme intime de ces stigmates dans l’état actuel de nos connaissances.

    Quant à nous, nous les considérons comme des manifestations d’ordre surnaturel. Nous sommes d’ailleurs prêts à les étudier scientifiquement en faisant nôtres les pensées du Dr Alexis Carrel » Les signataires développent ces pensées avant leur dernier mot :

    « Il suffit d’avoir passé quelques heures en toute liberté d’esprit auprès de Mlle Robin pour être convaincu que ce sont bien là vérités éternelles. »

    Ainsi on se trouve en face d’un document composite, dans lequel les « experts », après un travail clinique sérieux, abandonnent leur position d’experts. Aujourd’hui, on n’accepterait pas qu’un médecin-expert se prononce sur le caractère naturel ou surnaturel d’un symptôme ou d’un syndrome. On lui demanderait seulement de dire qu’il n’y trouve pas d’explication. Les choses étaient peut être différentes il y a 80 ans ???

    La désignation comme experts de copains dont au moins l’un d’entre eux a des liens très proches avec la patiente à expertiser risque d’induire chez ces « experts » des « biais cognitifs », qui pourraient expliquer les étrangetés du « rapport médical » que nous scrutons.

    On peut, cependant, apprécier le fait que les médecins insistent sur leurs incertitudes et leurs doutes. Hélas BIEN DES PANÉGYRIQUES ULTÉRIEURS PRÉSENTERONT LEURS PROPOSITIONS COMME DES CERTITUDES. Or dans le rapport, on ne peut relever que deux affirmations conclusives cliniquement fondées :

    Ils affirment « sans contestation possible » l’absence de certains syndromes neurologiques.
    Ils affirment (mais sont un peu moins formels) la présence de « stigmates » qui consistent en des dépôts de sang sans aucune lésion cutanée sous-jacente…
    Le reste est le fait de leur « certitude morale ».

    Il faut noter que J.J. Antier, dit clairement qu’il abrège un long rapport, en signalant qu’il en résume certains passages.

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  15. Je viens de terminer l’excellent livre de l’historien Joachim Bouflet. Une mine d’informations factuelles pour mieux comprendre Marthe Robin. Lui aussi va dans le sens d’ un trouble de la personnalité multiple. Dans le DSM-III, l’hystérie a été démembrée au profit des troubles somatoformes de la personnalité histrionique et des troubles dissociatifs. Les personnalités multiples appartiennent à cette catégorie.

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